J’ai appris que le mot ne vaut rien sans le geste

                      « J’ai appris que le mot ne vaut rien sans le geste »

 

Alexis Gruss, Directeur de cirque et ses chevaux.

 

« Je ne dresse pas les chevaux, je les éduque. La différence ? C’est le respect, base de toute éducation digne de ce nom. Et respecter signifie s’adapter. J’ai soixante chevaux et soixante méthodes différentes d’éducation ; ce n’est pas au cheval de s’adapter à moi, c’est à moi de m’adapter à lui. C’est cela, respecter. C’est savoir écouter, et pas seulement avec ses oreilles : c’est voir, sentir, toucher, être présent à l’autre avec tous ses sens. Sans cela, rien ne se transmet. La parole ne suffit pas. Il faut l’alliance du mot et du geste. J’en fais l’expérience tous les jours avec les chevaux. Ce matin encore, Domino, le pur-sang que je montais, n’est pas venu correctement à l’appel, parce que mon toucher n’était pas le bon. Mais cette vérité vaut dans toute relation de transmission. Or notre époque l’oublie, et cela, à mon sens, explique tant de dérives dans les comportements ; quand le savoir ne passe plus que par la pensée, par le savoir intellectuel et passif, il ne peut être véritablement intégré. Car la mémoire a besoin du geste, de l’effort physique, des erreurs commises.. C’est la différence entre ce que propose l’enseignant, qui se sert uniquement de l’argumentation pour faire comprendre quelque chose, et le maître , qui parle moins qu’il ne montre le mouvement.

Avec le cheval, il me faut être un maître si je veux véritablement « transmettre ». Et il en devient lui aussi mon maître. Moi, je ne sais rien, ou, quand je crois savoir, je m’aperçois que je ne sais rien. On apprend uniquement dans la rencontre, c’est un mouvement sans fin. Alors, comment résumer en un mot tout ce que j’ai pu découvrir grâce aux chevaux ? Peut-être en disant qu’avec eux, j’ai tout simplement appris à vivre avec les hommes. »

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